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En ce 12 avril, jour de ce qui aurait été le 89e anniversaire de Frankétienne, l’écrivain Dany Laferrière célèbre la mémoire vibrante d’un géant qui, malgré sa récente disparition, reste intensément présent. Dany Laferrière affirme avec force et tendresse : « Frankétienne n’est pas mort. Il vient à peine d’arriver. » Un hommage vibrant à une figure monumentale dont l’œuvre déborde de vie, de couleurs, de sons, d’excès et d’humanité.
Frankétienne, souvent qualifié de « génie baroque » de la littérature haïtienne, n’était pas seulement écrivain. Il était poète, peintre, chanteur, penseur, performeur — un homme-orchestre, une force de la nature artistique. Dany Laferrière le rappelle avec émotion : « Il voulait être peintre, il a peint 7000 tableaux. Il voulait être écrivain, il a publié 70 livres. Il voulait tout être — et il l’a été. »
Son œuvre, selon Laferrière, est une « bombe à retardement » qui commence tout juste à exploser, notamment dans les cercles universitaires. « Quand il était vivant, il était l’arbre qui cachait la forêt… la forêt de ses mots, de ses imageries. » Aujourd’hui, ces mots émergent, libres, prêts à être lus sans son ombre imposante. Frankétienne devient cette forêt elle-même.
Ce qui frappe dans l’hommage de Laferrière, c’est l’idée que Frankétienne écrivait comme on danse, comme on joue, comme un enfant libre de toute contrainte : « L’enfance, c’est le cœur de son œuvre… L’espace où rien n’est interdit, où seule la jouissance compte. » Une écriture sans filet, débordante, qui étonne, engloutit, fascine.
Dany Laferrière se souvient aussi de l’homme, du conteur, du voisin qui passait dans son quartier, parlant à tout le monde d’égal à égal, y compris aux enfants, leur racontant avec malice ses aventures amoureuses, sa vie d’artiste, ses rêves trop grands pour un seul corps. « Il n’était pas snob. Il parlait à tout le monde. »
Frankétienne n’avait, semble-t-il, aucune idée de sa propre force. « Il n’était pas au courant de lui-même… Toute vraie force est dépassée par elle-même. » Et cette force, c’était l’obstination. L’écrivain qui, selon Laferrière, avait commencé avec moins de talent que d’autres, a fini par les dépasser, par pur entêtement, par soif d’apprendre, par grandeur d’âme. « C’est un marathonien. »
Laferrière conclut son hommage par une vérité poétique : « Aujourd’hui, si vous croyez que Frankétienne est mort, c’est vous qui l’êtes. » L’auteur d’Ultravocal, de Mûr à crever, de Désastre ou de H’Éros-Chimères, n’est pas une mémoire figée. Il est un verbe vivant, une voix qui continue d’enchanter, de perturber, de libérer.
En ce 12 avril, on ne commémore pas une absence. On célèbre une présence — indomptable, éclatante, essentielle.
Écrit par Haïti Inter
today5 avril 2025 48 2
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