Marie-Denise Douyon: « Je suis passée dans la machine de l’horreur et de la torture »

Marie Denise Douyon est une femme aux multiples facettes : écrivaine, illustratrice, conteuse et peintre. Son parcours de vie, empreint de défis et de courage, est une ode à la richesse culturelle et à la force de l’esprit humain. Née en Haïti, elle fuit son pays natal à l’âge de trois ans avec ses parents pour échapper au régime dictatorial de François Duvalier. Cette fuite marque le début d’une vie nomade qui la mène au Maroc, aux États-Unis, et enfin au Canada. Malgré ces exils successifs, Haïti demeure au cœur de son œuvre.

Dans les années 1990, Marie Denise Douyon retourne en Haïti, animée par le désir de renouer avec ses racines. Cependant, son séjour se transforme en cauchemar lorsqu’elle est arrêtée arbitrairement sous le régime militaire de Prosper Avril. « Je suis passée dans la machine de l’horreur et de la torture », confie-t-elle lors d’une interview qu’elle nous a accordée à Paris en 2024, à l’occasion du Salon du Livre Haïtien. Emprisonnée, confrontée à des violences, elle survit grâce à une force intérieure inébranlable.

Aujourd’hui, Marie Denise Douyon se consacre à l’écriture de livres pour enfants. Ses récits, inspirés des cultures des pays où elle a vécu, célèbrent la diversité et invitent les jeunes lecteurs à s’enraciner dans leurs identités multiples. Parmi ses ouvrages emblématiques, on trouve Slimane, un très bel âne de Léogâne, ou encore Le pélican de Tétouan, qui invitent les enfants à découvrir des lieux riches en histoires et traditions. À travers ces histoires, elle intègre des mots en créole, en darija ou en d’autres langues, créant un lien intime entre ses récits et les origines des jeunes lecteurs.

« Une simple histoire ludique peut profondément toucher un enfant, l’aider à se reconnaître et à s’enraciner », explique-t-elle. Les retours des enfants qu’elle rencontre, qu’ils soient de première, deuxième ou troisième génération d’immigrants, témoignent de l’importance de cette reconnaissance culturelle.

Marie Denise Douyon explore également des sujets plus complexes, comme l’occupation américaine d’Haïti ou la résilience face aux injustices historiques. Dans son livre Léo Kako, le taureau héros, elle raconte l’histoire d’un taureau révolté contre l’oppression, une métaphore puissante sur l’importance de la résistance et de la dignité. À travers ses œuvres, elle aspire à transmettre des valeurs de courage et de résilience aux nouvelles générations d’Haïtiens, qu’ils vivent en Haïti ou à l’étranger.

Douyon ne cesse de souligner l’immense potentiel du peuple haïtien : « Imaginez un Haïti nourri économiquement et culturellement, avec les outils et les capacités nécessaires. Nous serions les leaders de la culture afro. » Pour elle, la culture, qu’elle soit littéraire, musicale ou picturale, est une richesse inestimable qui porte en elle l’espoir d’un renouveau.

Forte de son héritage multiculturel, Marie Denise Douyon est une voix essentielle de la diaspora haïtienne. Son optimisme et son engagement inspirent, rappelant que l’art et la littérature sont des vecteurs puissants pour tisser des ponts entre les cultures, reconstruire la dignité et transmettre l’espoir. Au travers de ses œuvres, elle continue de rendre hommage à Haïti, tout en célébrant la diversité humaine.

Que ce soit dans les pages de ses livres ou lors de ses rencontres avec les enfants, Marie Denise Douyon nous enseigne que nos histoires, bien que parfois empreintes de douleur, sont des trésors précieux à transmettre et à partager.

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